Au mauvais moment mais au bon endroit. [PV Maïlin R.]

Il était encore tôt à Babylon, pourtant Eleanor était bel et bien réveillée. Elle avait découchée une fois de plus pour passer la nuit avec ses amis et la finir avec un bel inconnu. Ce dernier avait d’ailleurs déposé la jeune femme aux abords de la ville et il était impossible pour celle-ci de rejoindre la demeure de ses parents sans passer par Faulkner Place. Même majeure et vaccinée, elle se devait de rendre des comptes à son père et sa mère, au risque de se faire jeter dehors. Elle était la petite dernière, la petite rebelle qui en faisait voir de toutes les couleurs à ses parents et malgré le nombre incalculable de « punitions » qu’on lui avait donnée, elle se faisait un plaisir de toujours désobéir, ne craignant plus les représailles depuis longtemps.
Des visages dans cette ville, elle en connaissait, sans jamais prendre la peine de retenir les noms. Et les gens la connaissaient également, elle était la fille de Carl Stuart, ce riche banquier de Staunton qui était l’une des plus grosses fortunes de Babylon. Mais ce n’était pas plus l’autorité de son père qu’elle redoutait, c’était celle de sa mère qu’elle avait depuis petite en horreur. Elle savait qu’en rentrant elle subirait la colère de sa génitrice et elle ferait mieux de se dépêcher pour se glisser dans la maison sans se faire remarquer. Elle pressa donc le pas et traversa la grande place à toute vitesse. Elle était plutôt vide comparée à la veille où le marché avait eu lieu mais les certains habitants matinaux étaient déjà en train de discuter ou se diriger vers les petits commerces pour faire leurs courses de la journée. Tout en marchant elle se mit à chercher son petit miroir dans son sac pour voir la mine qu’elle avait, ayant quitté la voiture de sa conquête un peu précipitamment. Et légèrement gaffeuse, elle ne vit pas la personne qui venait en sens inverse. Elle la percuta donc de plein fouet et fit tomber son sac par terre. Malheureusement le peu d’affaires que contenait sa sacoche se déversa sur le sol. Elle se baissa rapidement pour attraper chacun des objets et les mit sans vraiment réfléchir dans le sac. La personne qui l’avait bousculée n’avait pas pris la peine de l’aider et lorsqu’elle se redressa, elle tomba nez à nez avec une belle brune dressée comme un piquet qui la regardait d’une façon plutôt étrange. Certes, Eleanor n’avait pas regardé où elle marchait mais si elle lui était rentrée dedans c’est qu’elle en avait fait autant, alors elle n’avait rien à se reprocher, en tout cas pas plus que cette étrangère.

- Désolée, s’excusa-t-elle tout de même avant de poursuivre son chemin.

Elle continua sa route, non sans se retourner une dernière fois vers le lieu de l’ « impact » et elle fut étonnée de voir que l’inconnue était restée immobile à la même place, et la regardait partir. Étrange ! Elle pressa d’autant le pas qu’elle sentait ce regard étrange sur elle. Elle disparut au coin de rue et s’arrêta une seconde pour repenser à cette « rencontre » vraiment très particulière. Mais un genre de carillon retentit, annonçant que l’heure tournait et qu’elle allait finir par tomber sur sa mère en ville au lieu de l’éviter chez elle. Elle n’était plus qu’à une centaine de mètre de la rue où elle habitait, croisant des passants qui se faisaient de plus en plus rares sur son chemin lorsqu’elle sentit comme une présence derrière elle. Elle se retourna une première fois, sans rien voir, puis après quelques autres pas, se retourna à nouveau pour voir qu’à à peine quelques mètres se trouvait la brune qu’elle avait percutait sur la place.

- Vous me suivez ? dit-elle sans mesurer le poids de ses mots. On se connaît ? continua Eleanor.

La jeune femme était très belle, elle avait la peau pâle et des yeux qui brillaient comme s'ils le soleil se reflettaient dedans, or, il était beaucoup trop tôt pour que l'intensité du soleil puisse illuminer son regard. Puis elle était si gracieuse dans sa façon de se tenir ou encore de rejeter sa chevelure en arrière qu'Eleanor en oubliait presque ce sentiment d'incertitude qu'il l'envahissait. Alors qu'elle était toujours raide comme un piquet ( Eleanor était alors persuadée qu'elle devait être danseuse, gymnaste, ou quelque chose dans ce genre ) elle se mit à bouger et passa devant la jeune frivole pour venir s'installer sur un banc situé un peu plus loin. Et c'est son côté hautain qui frappa Eleanor en second.

(...) en cette jolie matinée !

Pour qui se prenait-elle avec cet air suffisant ? Ce sourire et ce ton ironiques. Malgré ce qu'elle avancait à propos de cette petite balade, Eleanor n'en croyait rien. Elle allait en sens inverse lorsqu'elle l'avait bousculée par inadvertance. La jeune femme devenait de plus en plus parano avec les évènements récents. Elle n'avait pas vraiment peur, mais était plutôt intriguée, il n'empêche qu'elle se méfiait de tout comportement louche. Pourquoi le tueur en série ne serait pas une magnifique psychopate aux airs de poupée ? En plus Eleanor était persuadée qu'il s'agissait d'un gang et n'importe qui pourrait être à l'origine ou complice de tous ces meurtres.

- Très bien, bonne PROMENADE alors, dit-elle en insistant bien sur l'avant dernier mot.

Elle partit ensuite, pressant le pas. Elle allait finir par être en retard et puis elle voulait à tout prix s'éloigner de cette étrange jeune femme. Elle continua de longer la rue non sans pouvoir s'empêcher de se retourner. Ce qu'elle vit lui donna froid dans le dos : l'autre jeune femme toujours dans la même position qui la regardait un sourire presque effrayant au coin des lèvres. Eleanor n'avait pas peur ??? Euuuh... un petit peu quand même ! Elle manqua même rentrer encore dans quelqu'un et s'excusa vaguement avant de tourner sur elle-même ne sachant plus où allait.

« Bah alors ma ptite, on est paumée ? »

Un petit fleuriste de quartier qui balayait la devanture de sa boutique, il avait bien remarqué l'air perdu de la jeune femme. Elle s'excusa encore et toujours avant d'entrer dans le magasin. Le marchand la suivit pour voir ce qu'elle désirait et la regardant tourner en rond. Il la laissa faire l'observant tout de même, assez intriguée de son comportement étrange. Elle ne semblait pas chercher quelque chose de précis, en tout cas pas dans sa boutique, alors il lui proposa son aide et fut surpris par ce qu'elle lui répondit « Vous pouriez me dire s'il y a une jeune femme assise sur le petit banc en face de la boulangerie ? » Il s'exécuta, tout en fronçant les sourcils et après être entré à nouveau, il répondit pour la négative. Eleanor lâcha alors un soupir de soulagement. Elle était partie. Elle remercia chaleureusement le fleuriste puis sortit pour reprendre son chemin, ne manquant pas de regarder en direction du banc avant de partir en sens inverse. « Partie, elle est partie ! » se disait-elle à elle même. Elle poursuivit son chemin, évitant de lever la tête pour croiser encore une personne suspecte. Lorsqu'elle tourna dans la rue de chez elle, elle crut halluciner en voyant...

- Mais... ne me dites pas que vous ne me suivez pas !!! Qu'est-ce que vous me voulez ???